L’ère industrielle aurait stoppé le refroidissement des océans

Une étude scientifique publiée le lundi 17 août dans la revue Nature Geoscience montrerait que l’industrialisation du monde a interrompu le refroidissement des mers, un fait qui n’avait jamais été prouvé. Pour en parler, Guillaume Leduc, chercheur du CNRS au Centre européen de recherche et d’enseignement de géosciences de l’environnement, cosignataire de l’étude.

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RFI : Est-ce que c’est une vraie découverte ?

Guillaume Leduc : C’est une vraie découverte à l’échelle globale et c’est notamment la première fois qu’on synthétise l’ensemble des données des températures de l’océan de surface. On avait déjà mis ça en évidence dans l’hémisphère nord en premier lieu et une autre publication, qui a été publiée il y a deux ans, a mis en évidence ce refroidissement pour les continents, mais c’est véritablement la première fois qu’on met en évidence ce refroidissement, de manière globale et à travers les sédiments océaniques pour l’océan.

Ce que vous montrez aussi, c’est finalement que ça n’a pas beaucoup d’intérêt de chiffrer globalement parce qu’il y a beaucoup de disparités. Je crois que ça peut atteindre 3 degrés aux pôles.

Ca peut atteindre 3 degrés aux pôles. Ce sont vraiment des maximales dans ce qu’on trouve nous dans notre base de données. Mais sur 2 000 ans, la moyenne se situe plus au-delà de 0,5 degrés Celsius et ça dépend bien évidemment aussi de l’endroit où l’on est. C’est-à-dire que les tropiques sont moins sensibles au changement climatique que les hautes latitudes en général.

Ce qui est très intéressant dans cette étude, c’est que vous êtes parvenus à expliquer le refroidissement pendant deux millénaires de nos océans et c’est donc dû aux volcans ?

Oui, ça c’est une surprise. Il faut déjà comprendre que ce refroidissement fait partie d’une tendance au refroidissement qui dure en fait depuis au moins 5 000 ans qui, elle, est induite par des changements dans la position de la Terre sur son orbite autour du Soleil. Mais là, sur les derniers siècles, nous avons enregistré une accentuation de ce refroidissement, à partir environ de 1 200 après Jésus-Christ, et cette période froide qui culmine pendant un petit âge glaciaire, fut marquée par une série d’éruptions volcaniques, plus fréquentes et plus violentes qu’auparavant.

On sait, on en parle beaucoup, qu’il y a un réchauffement climatique global. Est-ce que ça veut dire que la Terre pour se réguler va générer plus d’éruptions volcaniques ? Est-ce qu’il faut s’y attendre?

Non. Attention, le climat n’agit pas sur la fréquence des éruptions qui sont, elles, complètement aléatoires. Nos résultats suggèrent simplement et seulement qu’en cas d’épisodes répétés d’éruptions volcaniques stratosphériques, c’est-à-dire à plusieurs kilomètres, qui pénètrent dans la stratosphère, [ces éruptions] pourraient éventuellement faire faire une pause au réchauffement climatique et qu’éventuellement cette pause pourrait perdurer au-delà de la décennie. Mais nous sommes encore très très loin de pouvoir prédire les éruptions volcaniques, et à long terme, seules les émissions de gaz à effet de serre sont le véritable problème en ce qui concerne le réchauffement climatique.

Le grand rendez-vous scientifique et climatique des mois qui arrivent, c’est la COP21 qui sera organisée à partir du mois de décembre à Paris. Est-ce que les experts qui y seront réunis, les représentants de toutes ces délégations, vont-ils se servir de votre étude?

Effectivement, la France va accueillir et présider la 21e conférence des Nations unies sur le changement climatique 2015, en décembre. Il faut savoir qu’en juillet, une conférence internationale a été organisée à Paris. Là, c’est une conférence scientifique pour discuter des résultats scientifiques publiés récemment, dont faisait partie notre étude. Nos résultats ont été présentés à cette occasion et ces résultats, ainsi que ceux qui ont été publiés dans le dernier rapport du GIEC, seront utilisés pour préparer au mieux la phase de négociations. Mais cette COP21 est principalement une conférence pour les décideurs, dans l’objectif de maintenir le réchauffement mondial en deçà de 2 degrés Celsius.

Source : RFI

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